Déclaration d’intention

Déclaration  des membres fondateurs de l’Association

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Pieds noirs originaires d’Algérie, nous avons fondé, avec des amis, « l’Association Nationale des Pieds Noirs Progressistes et leurs Amis » le 8 novembre 2008.

Depuis l’arrivée en France, chacun s’est positionné dans les débats sur la société française en fonction de sa situation sociale et de son cheminement politique personnels. Mais nous partageons tous la même analyse du système colonial imposé par la France au peuple algérien et le même engagement pour un avenir d’estime et d’amitié entre Français et Algériens, et de coopération entre les deux états. Plus de quarante-cinq ans après l’accession de l’Algérie à l’indépendance et après plusieurs espoirs déçus d’une réconciliation durable entre les deux pays, nous estimons qu’il est temps de faire entendre notre voix.

Les membres fondateurs de l’ANPNPA ne se reconnaissent pas dans les associations de rapatriés existantes. Les « amicales » rassemblant les originaires de telle ou telle ville pour des échanges de souvenirs de jeunesse, sont nostalgiques mais généralement sympathiques. La plupart des autres associations, revendiquant une représentativité qu’elles n’ont pas, nient les injustices du passé, et s’opposent à toute réconciliation entre la France et l’Algérie. Faute de contradiction organisée à l’action de ces associations, les pieds-noirs ont trop longtemps été présentés comme une communauté uniforme qui, après avoir profité du système colonial, serait animée d’une vaine nostalgie de l’Algérie française, et serait hostile à tout rapprochement des deux peuples.

L’APNPA a une vision radicalement différente et entend le faire savoir. Ses membres fondateurs sont issus de familles généralement installées de longue date en Algérie, et ont pour la plupart vécus les derniers temps du colonialisme et de la guerre d’indépendance. Ils s’estiment porteurs d’une mémoire qu’ils tiennent à faire partager et dont ils demandent la prise en compte par l’histoire.

L’ANPNPA souhaite contribuer à une réconciliation sincère et durable entre la France et l’Algérie et inciter les responsables des deux états à adopter une politique d’entente et de coopération fondée sur la spécificité des relations franco-algériennes marquées par 130 années de domination coloniale et d’affrontements, mais aussi par une longue fréquentation des peuples.

Les membres de l’ANPNPA fondent leurs convictions sur une analyse lucide et objective du passé, et leur engagement sur les enjeux d’un avenir qu’ils croient souhaitable et possible.

En ce qui concerne le passé :
– Ils condamnent sans réserve le système colonial qui a été imposé par l’état français, avec à l’époque un large consensus national, aux populations d’Algérie. Ils dénoncent les injustices de ce système, les crimes et les violences qu’il a commis et engendrés pour s’instaurer, se maintenir et résister au désir de libération du peuple algérien.
– Ils rappellent aussi que des hommes et femmes, venus de France comme d’autres pays européens, ont vécu sous l’emprise de ce système et en ont été les instruments souvent inconscients et parfois les victimes.
– Ils rappellent que nombreux furent ceux et celles qui dénoncèrent les injustices dont ce système était la cause et qui militèrent pour son abrogation. Certains tirèrent les conclusions ultimes de leur engagement, en participant à la lutte armée, quand celle-ci s’avéra pour eux la seule issue possible. D’autres, sans aller jusqu’à ces positions extrêmes, militèrent pour une politique d’autodétermination préservant les chances d’une coexistence future.
– Ils rappellent que pour la plupart d’entre eux, comme d’ailleurs pour de nombreux militants nationalistes algériens, l’accession de l’Algérie à l’indépendance n’impliquait pas nécessairement une rupture avec la France mais pouvait au contraire inaugurer entre les deux pays et les deux peuples des relations nouvelles d’entente et de coopération.
– Ils dénoncent et condamnent sans réserve l’action de l’OAS qui par sa politique d’assassinats et de destructions aveugles a conduit les pieds noirs au désespoir et les a poussés à l’exode.
– Ils attendent des historiens l’écriture dépassionnée d’un passé aux multiples facettes, histoire qu’il est temps de transmettre aux nouvelles générations de France et d’Algérie, pour leur montrer que malgré ses drames, ses affrontements et ses violences, elle autorise la construction d’un avenir solidaire.

En ce qui concerne l’avenir:
– Ils estiment que du fait de leurs engagements passés et de leur attachement toujours très fort à l’Algérie, qui reste d’une certaine manière « leur pays », ils ont un rôle à jouer dans la construction de cet avenir, en étant plus que d’autres des « passeurs » de connaissance, d’estime et d’amitié.
– Ils entendent militer pour un renforcement de relations humaines entre les citoyens des deux pays et en France entre français de souche, résidents algériens et français d’origine algérienne. À cet égard, ils réclament une plus grande liberté de circulation des personnes entre les deux pays et dénoncent l’amalgame fait entre immigration durable et circulation temporaire des personnes.
– Ils entendent militer également pour l’instauration entre l’Algérie et la France de relations de partenariat exemplaires, exemptes de facteurs de domination et valorisant les complémentarités des deux pays afin de bâtir, ensemble et dans l’intérêt mutuel de leurs peuples, un avenir durable de prospérité partagée.
– Ils entendent dénoncer les manœuvres de toutes natures des nostalgiques du passé, figés sur des positions rétrogrades et revanchardes, et par contre soutenir ou proposer des initiatives allant dans le sens de la réconciliation et la solidarité.

Les fondateurs de l’ANPNPA estiment que les pieds noirs qui partagent ces convictions et cet espoir sont nombreux. Ils les appellent à rejoindre l’ANPNPA et à y amener leurs amis.

Supplément à la déclaration des membres fondateurs de l’ANPNPA (décembre 2012)

Dans l’ANPNPA, créée en novembre 2008, les Amis sont des Français dont l’histoire personnelle a croisé celle de l’Algérie et des Algériens vivant ici ou là bas ; leur rôle est important à la fois pour rester ouvert sur l’avenir et servir de passerelle les uns vers les autres, et pour éviter le piège stérilisant du communautarisme, la nostalgie du paradis perdu, la « culture pied noire » (un ami Toulousain a une fois dit qu’on avait attribué à Albert Camus la phrase suivante : « la culture pied noire : un grand vide à forte odeur d’anisette »). Les autres, les pieds noirs, sont des « Français d’Algérie » (entendre par là ceux qui dans l’Algérie coloniale étaient citoyens
français : immigrés venant des quatre coins de l’Europe et « indigènes » de religion juive) et leurs descendants, qui pensent aujourd’hui, ou qui l’ont toujours pensé, que la lutte des Algériens pour l’indépendance était juste. L’association s’est évidemment, et heureusement ouverte aux pieds noirs originaires du Maroc et de Tunisie.

Un mot sur ce qui devient pour nous une préoccupation majeure : la résurgence des thèses d’extrême droite, l’apologie du régime colonial et la nostalgie de l’Algérie française, encensées jusqu’à la réhabilitation et la glorification de l’OAS. Ces tentatives de réécriture de l’histoire de la France en Algérie, attendues lorsque véhiculées par le Front National, sont maintenant menées par la droite classique, simplement UMP, et le furent du plus haut niveau politique par les gouvernements précédents sous la houlette Sarkosy (projet de loi sur les aspects positifs de la colonisation, « musées » de l’Algérie française dont la mise en place est confiée à des associations de pieds noirs d’extrême droite, légions d’honneur distribuées à d’anciens tueurs de l’OAS, stèles à leur honneur, Bigeard aux Invalides, etc).

La ligne politique prise depuis par le nouveau gouvernement, dirigé par le parti socialiste, est heureusement d’une autre nature. Elle n’est cependant pas dénuée d’ambiguïté et reste loin de l’ouverture nécessaire ; ainsi, alors même que le président Hollande reconnaissait « la sanglante répression » qui coûta la vie à des centaines d’Algériens le 17 octobre 1961 à Paris (et non pas le crime d’État que fut ce massacre), le ministre Le Drian rendait très officiellement hommage au général Bigeard, le sinistre tortionnaire en chef pendant la guerre d’Algérie. Si un pas en avant important a été franchi avec la visite de François Hollande en Algérie et les discours qu’il y prononça sur le « caractère injuste et brutal de la colonisation », de tels propos restent bien trop timides pour qualifier le fait colonial et les crimes qui l’ont accompagné durant plus de 130 ans. Il est aujourd’hui grand temps que le gouvernement actuel s’engage de manière plus forte et plus cohérente (oublions Bigeard…). Aller plus loin est indispensable, non seulement pour que nous puissions regarder sereinement et en conscience notre propre histoire ou pour que se débloque la relation franco-algérienne – car oui, il y a un procès à faire de la colonisation – ; mais aussi pour contrer les discours de haine et de revanche qui fleurissent aujourd’hui en France, et pour faire disparaître les relents racistes hérités du passé colonial.

En effet, et plus important encore, cette agitation sur le passé s’accompagne de campagnes racistes et xénophobes inacceptables, qu’il faut dénoncer et combattre. La cible aujourd’hui c’est (de nouveau) « les arabes », avec comme nouvel et bel angle d’attaque la religion musulmane : l’islamophobie, qui ne vise pas tant l’islam que ceux qui le pratiquent (tout comme l’antisémitisme ne cible pas le judaïsme, mais les juifs, croyants ou pas!). Débarrassés de Sarkozy nous le sommes, mais pas de cette idéologie nauséabonde.

C’est pourquoi se battre contre ces falsificateurs de l’histoire, les « nostalgériques » et leurs alliés politiques, va plus loin que leur simple dénonciation ; c’est se battre pour la paix, la réconciliation, l’amitié entre les peuples.

Tout cela définit les deux axes majeurs de l’activité de l’ANPNPA : porter témoignage et militer pour l’écriture (par les historiens) d’une histoire lucide et dépassionnée de la France en Algérie ; œuvrer à la réconciliation des deux pays, au renforcement de l’amitié entre les peuples des deux rives de la Méditerranée, et en France lutter contre le racisme et la xénophobie. Un aspect particulièrement important pour nous, un besoin, est donc de prendre langue, d’échanger, de travailler ensemble, avec nos frères Algériens ou d’origine algérienne, avec des associations qui les représentent dans nos villes et nos quartiers.

Visitez le site de l’association : http://www.anpnpa.org/

Contactez l’ANPNPA par mail : contact@anpnpa.org

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